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Devil Survivor 2

Fiche complète de ce jeu

L'innovation est souvent un pari risqué. Trouver le juste milieu entre la différence qui relancera la passion des joueurs et les éléments récurrents qui font l'âme d'une série, le tout sans négliger la qualité intrinsèque du jeu, reste et demeure un exercice très ardu. Nombre de séries comme Zelda, Final Fantasy ou Castlevania s'y sont déjà cassées les dents, là où d'autres s'en sont tirées avec les honneurs comme Metroid avec l'opus Prime ou Silent Hill avec Shattered Memories. Dans ce domaine, Atlus avait également su tirer son épingle du jeu avec le spin-off SMT Devil Survivor. Doté d'un scénario remarquablement profond, d'un gameplay semi-tactique et d'un déroulement variable juste assez différent des acquis de la licence pour être nouveau sans prendre le fan totalement au dépourvu, ce jeu pouvait passer pour l'un des meilleurs titres DS de l'année 2009, même s'il s'adressait en priorité aux obsédés textuels.
En juillet 2011, sa suite, Devil Survivor 2, vit le jour au Japon, toujours sur DS, et sa localisation aux USA se fit en février 2012, en attendant sa venue dans nos vertes contrées. Faut-il y voir un titre sans prétention, la surexploitation basique d'une recette qui a marché une fois, ou une nouvelle démonstration d'innovation brillamment menée ?

- Je sauverai le monde... parce que je n'ai rien de mieux à faire ! -

Tokyo, Avril 201X. Deux lycéens, le héros et son meilleur ami Daichi Shijima, viennent de passer l'examen final de leur troisième année de lycée et s'apprêtent à profiter de leurs vacances. Leur conversation part vite sur la dernière mode : le site Nicaea. D'après la rumeur, les adhérents de ce site reçoivent parfois des vidéos très particulières, qui montrent les conditions dans lesquelles mourront leurs amis les plus proches, et ce, dans des délais très courts.

Après s'être inscrits sans vraiment y croire, les deux adolescents ainsi qu'une jeune fille nommée Io Nitta auront pourtant la désagréable surprise de constater qu'il ne s'agit pas d'une légende urbaine. Une vidéo leur parviendra en effet par mail, décrivant leur mort dans un effroyable accident de métro. Cependant, par la seule force de sa volonté, le héros refusera ce trépas anticipé. Nicaea installera alors sur son téléphone portable une application pour invoquer des démons, ce qui permettra à ses amis et à lui-même d'échapper à cette funeste destinée. Mais ce n'est là que partie remise, car le monde qu'ils avaient connu semble avoir disparu. À la place, c'est un monde infesté de démons assoiffés de sang, privé d'ordre social et où la mort guette en permanence qui les attend.

Après quelques péripéties, les jeunes gens rejoignent par la force des choses une organisation gouvernementale top secrète appelée JP, menée par le mystérieux Yamato Hotsuin et son bras droit Makoto Sako. Ce groupe leur apprendra que Tokyo n'est pas la seule ville touchée par la calamité, et que le pays court probablement à sa perte si des mesures ne sont pas prises. Leur aptitude à contrôler les démons les rendant plus précieux qu'ils ne veulent bien le croire, les héros se voient offrir l'assistance de JP en échange de leur collaboration. Cela les mènera à écumer Tokyo, Osaka et Nagoya, aux côtés d'autres personnages hauts en couleurs et tous assoiffés de vie. Ensemble, il leur faudra lutter contre les démons mais aussi les redoutables Septentriones.

L'histoire de Devil Survivor 2 n'a aucun lien, direct ou indirect, avec celle du premier opus, en dehors de légers clins d’œil. Il est tout à fait possible d'y jouer sans avoir jamais touché à Devil Survivor. Si on y retrouve les habituelles références à la mort, les situations pré-apocalyptiques, un riche contenu culturel et les personnages assez barrés mais profondément humains comme la série des MegaTen sait si bien les faire, le reste du jeu se démarque des poncifs de la licence. Bien moins torturée que d'ordinaire, l'ambiance se veut intimiste, et c'est dans un monde presque guilleret qu'évolue le joueur. Malgré les cinématiques dramatiques qui nous montrent les dégâts subis, on a parfois peine à croire que le pays soit en grand péril et sorte d'une crise sans précédent tellement les autres situations sont décontractées. Cela permet au jeu de ne pas se montrer trop oppressant et encourage à poursuivre l'aventure pour son aspect comique plus que pour sa noirceur. En outre, les personnages sont très attachants, même s'ils semblent tous sortis des stéréotypes de shônen tels le lycéen pleutre, la sainte-nitouche, l'androgyne glacial, la petite complexée, le guignol toujours à l'ouest, la scientifique qui jargonne, un étrange Monsieur Sourire et bien d'autres encore. On se croirait souvent dans un volume de Bleach, une impression encore renforcée par le character design. Ces personnages seront un atout pour certains joueurs, mais un repoussoir pour d'autres, du simple fait de leurs caractères totalement surréalistes et de leurs comportements surfaits au possible.

Toujours dans les références aux mangas les plus connus, on peut penser que les clips de Nicaea sont une opposition à Death Note, mais sans l'aspect « réflexion au huit millième degré » et les complots en tous genres. Néanmoins, même si cette idée a du potentiel, elle passe rapidement au second plan, et on a parfois du mal à garder la pêche tout au long du jeu. L'histoire avance totalement au radar pendant les deux-tiers – voire les trois-quarts – du temps et démarre également sur une énorme impression de déjà-vu. Tout n'est que prétexte à alterner les discussions banales, les questions sans réponses et les combats héroïques dans une gigantesque fuite en avant, sans vraiment savoir dans quelle direction on évolue, ni à qui on fait réellement face. Au mieux, on sait qu'il faut terrasser des monstres gigantesques et très moches nommés Septentriones quand on les croise et empêcher la réalisation des clips sanglants de Nicaea quand on les reçoit. L'aspect « survie à un monde hostile » du début du jeu s'efface progressivement au profit d'une bête chasse aux gros monstres, entrecoupée de sauvetages à la Minority Report qui n'exploitent pas tous les filons possibles comme le faisaient les Laplace Mails.
Certes, Devil Survivor présentait peu ou prou les mêmes éléments et souffrait lui aussi de quelques sévères baisses de régime, mais il parvenait malgré tout à maintenir l'attention par le climat alarmiste omniprésent d'un Tokyo ruiné, la pression du Death Clock, et surtout par les multiples remises en question des motivations de chacun ou les attaques tout sauf innocentes contre la société. Or, le second opus ne jouit ni d'un rythme très soutenu, ni d'un leitmotiv accrocheur, ni de nombreuses piques bien senties. Si vous n'appréciez pas son ambiance très manga ni son gameplay, vous risquez fort de décrocher bien avant d'attaquer le noyau dur de l'histoire, le fameux temps des décisions et des réflexions sociétales.

Car ce n'est qu'au soir du cinquième jour, soit après une quinzaine d'heures environ, que l'on retrouve les interrogations existentielles et les choix cornéliens chers à la saga, même si on distingue clairement les trois Alignements fondamentaux du jeu de rôle : la Loyauté, la Neutralité et le Chaos. Les derniers opus de SMT n'étaient pas toujours à la hauteur à ce niveau : Strange Journey ne faisait qu'aligner des poncifs superficiels au possible issus d'un shônen de base, voire d'un film d'animation de Walt Disney, les Personas n'allaient pas toujours assez loin dans leur réflexion, seul Devil Survivor premier du nom sauvait la face. Ici, le contenu moraliste s'avère proche d'un Lucifer's Call, mature et parfaitement cohérent, mais aussi moins fermé et plus argumenté qu'auparavant. Dès lors, les quinze heures de vacuité qui ont précédé en valaient vraiment la peine, et peut-être serez-vous surpris par l'empathie que l'on éprouve alors à l'égard de certaines figures qui semblaient, jusque-là, vraiment très ordinaires, bien que cet exercice ait été mieux réussi par Persona 2 : Innocent Sin. Certes, on peut penser que le tout est traité avec une pointe de sophisme et de facilité, mais ça, c'est seulement si on ne cherche pas le message derrière les messages...

- Je ferme les yeux pour ne pas te voir... -

La célèbre expression « juger un livre à sa couverture » prend tout son sens avec Devil Survivor 2, car si on s'arrête à la jaquette, le character design de Yasuda Suzuhito fera dresser les cheveux sur la tête de nombre de joueurs et n'incitera pas forcément à l'achat ; un comble, si on considère que la galerie de protagonistes est peut-être l’argument central du titre. Loin du rendu globalement réaliste entrecoupé de figures plus excentriques (et d’emprunts aux travaux de Soejima) expérimenté dans le premier opus, l'apparence des héros est ici beaucoup plus conceptuelle. Entre autres, le héros et ses allures de Soma Cruz de Dawn of Sorrow ne plaira pas à tout le monde, or le charisme d'un personnage principal a quand même son importance quand on est censé l'incarner pendant des dizaines d'heures. Du reste, il y a une indéniable cohérence dans la direction artistique, l'alternance des teintes monochromes (noir, blanc ou gris) avec une touche de couleur vive pour chaque personnage étant assez plaisante sur le plan visuel. Cependant, ce choix s'accorde parfois assez mal avec l'univers du jeu, et passerait mieux dans une exposition d'art moderne que dans un jeu vidéo, sauf si l'univers le justifiait comme dans Digital Devil Saga. Par contre, un point vraiment très discutable du design reste la silhouette des personnages féminins fréquemment gonflée à l'hélium. Comme chacun le sait, même dans une œuvre de fiction, il ne suffit pas d'une paire de seins de la taille d'une pastèque pour faire une jolie fille, même les plus plates poitrines peuvent avoir leur charme, mais le sire Yuzuhito semble l'avoir oublié jusqu'à en négliger les lois de la physique au profit des voies du silicone !

Sorti du design, les qualités graphiques du jeu n'ont pas vraiment progressé depuis Devil Survivor. Si les détails restent peu ou prou au même niveau, et sont toujours un peu à la traîne face à d'autres titres comme Pokémon Noir/Blanc, c'est surtout l'animation qui est à plaindre. Par exemple, les personnages comme les PNJ n'ont qu'une seule posture, parfois inadaptée aux situations. Voir les scènes de séparations et les « au revoir » avec des personnages en position de combat nuit gravement à la crédibilité. Après, si on oublie ces quelques maladresses, le jeu reste très correct, même s'il y a pas mal de « réutilisations » d'anciens dessins, ce qui peut se justifier pour les environnements. La 3D isométrique est toujours d'actualité, ainsi que les petites figures légèrement animées en déplacement, les artworks en discussion et les images fixes en combat. Ces dernières sont toujours assurées par le talentueux monster designer Kazuma Kaneko. Rien de neuf en définitive, à part peut-être le passage de l'écarlate au bleu marine comme couleur des menus et le nouveau style du character design ; ceci étant, le tout passe quand même comme une lettre bien affranchie à la poste quand elle n'est pas en grève !

- … mais j'ouvre les oreilles pour mieux t'entendre ! -

On pouvait faire de nombreux reproches à la bande-son du premier Devil Survivor, notamment à cause des pistes trop courtes et trop froides. Or, le chef compositeur, Kenji Ito, semble avoir entendu ces doléances, et c'est au niveau sonore que les plus gros progrès ont été faits. Ce n'est pas étonnant quand on sait que l'intéressé a travaillé sur nombre de RPG mythiques comme les SaGa Frontier ou les Seiken Densetsu, son expérience n'est donc plus à démontrer. Riche d'émotions, l'OST de ce jeu s'avère vraiment aboutie, jouant davantage sur les instruments réels comme l'orgue ou le violon que sur le synthétiseur. Les cinématiques en ressortent grandies, amplifiées, et les combats sont nettement plus dynamiques également. Les thèmes musicaux de Yamato Hotsuin et de l'Anguished One contribuent énormément à en faire deux des protagonistes les plus charismatiques de la saga. Bien sûr, quelques fausses notes ressortent parfois, comme la musique des Septentriones qui n'est pas forcément très convaincante pour un boss theme, bien qu'elle soit agréable à écouter en elle-même, mais rien de bien grave. Depuis l'arrivée de Shoji Meguro, remplaçant de Tsukasa Masano, les bandes-sons des MegaTen reposaient sur la concordance des musiques et des situations, comme dans Lucifer's Call, ou sur la continuité du style choisi avec le jazz des Devil Summoner et la « pop » des Persona, mais pas tant que ça sur la simple richesse des mélodies. Le renouveau pourra déconcerter certains fans, d'autres sauront apprécier l'ouverture que cela représente pour la saga.

Une « Arrange Soundtrack » de sept pistes a été composée pour la sortie japonaise du jeu. Si vous avez l'occasion de l'écouter, ne vous en privez pas, car elle vaut vraiment le détour. Les pistes sont reprises dans une version améliorée, avec des sonorités très jazz. Le tout n'est pas sans rappeler l'album Reincarnation qui fut édité pour Persona 3, quoique celui-ci partait bien plus sur le R'nB, mais du moment que la prestation est de qualité, il n'y a pas de raison de lui faire des reproches.

Il n'y a pas de doublages, ni anglais ni japonais. À l'heure où cette pratique est presque un acquis, même sur console portable, on peut le prendre comme une déception, mais si d'un autre côté, cela évite les performances pour le moins médiocres auxquelles on a droit depuis quelques années de la part des doubleurs américains.

- Ça fait du bien de frapper là où ça fait le plus mal -

Le gameplay de Devil Survivor peut être qualifié de RPG semi-tactique, plus proche de Valkyrie Profile : Covenant of the Plume que de Fire Emblem ou de Disgaea. Quatre humains montent au front, chacun étant le leader d’une équipe et pouvant être épaulé d'un ou deux démons, pour un maximum de douze unités. Le leader joue un rôle crucial : quand il meurt, toute l'équipe tombe avec lui.
Cependant, la présence de démons à ses côtés augmente grandement sa résistance, et abattre directement le leader donne moins d'expérience et de Macca que de battre toute une équipe, ce qui fait qu'il vaut mieux s'occuper au préalable des seconds couteaux.

Les batailles se découpent en deux parties : les déplacements sur une carte plane, et les affrontements proprement dits au tour par tour, dans un style Digital Devil Saga. Au tout début du combat, il faut composer les équipes, et associer les compétences aux humains. Elles peuvent être des attaques, physiques ou magiques, des qualités passives comme la résistance à un élément ou l'augmentation des dégâts critiques, et enfin une compétence automatique qui altère les conditions de bataille, notamment par un boost de certaines caractéristiques. Signalons aussi que les humains n'ont pas de compétences propres, ils ne peuvent que copier celles de leurs adversaires, il n'y a pas d'équipement (ni armes, ni armures) et seules les statistiques de base les différencient, comme la Force inhumaine de Jungo ou l'équilibre Magie/Agilité d'Airi. Il y a aussi leur niveau de « Fate », un simulacre des « Social Links » de Persona 4, qui leur donne des résistances innées ou des moyens de coopération avec le héros, comme le partage du « Skill Crack » ou la capacité d'échanger des démons en cas de coup dur.

Tous les personnages ont la même capacité de mouvement : quatre cases pour le joueur, trois pour les ennemis, contrairement au premier opus où l'Agilité donnait parfois un bonus ou un malus de distance à parcourir. Bien sûr, certains traits ou aptitudes propres aux démons comme les Avians ou les Wilders peuvent altérer ce chiffre. La portée d'attaque est limitée à une case et expose à la contre-attaque, sauf pour les Dragons et les Viles qui permettent d'attaquer à distance. Il faut approcher ses personnages tout en tâchant de rester groupé, sous peine de voir trois ou quatre équipes adverses s'acharner sur chaque personnage et les mettre tous au tapis avant d'avoir pu réagir. Les HP se récupèrent uniquement via des sorts, le jeu n'offrant pas d'objets de soin. Il n'y a pas de séparation entre tour allié et tour ennemi comme dans la majorité des Tactical RPG ; on est plus proche du système de Final Fantasy X.
L'ordre des tours dépend des actions effectuées : cumuler déplacements, attaque et soins en un tour impose au personnage de récupérer longuement, ce qui le laisse longtemps sans défense, alors qu'un déplacement seul permet d'agir à nouveau plus rapidement. Petit à petit, on apprend à maîtriser toutes sortes de techniques : anticiper les déplacements de nos adversaires pour frapper le premier, exploiter intelligemment les attaques à distance ou combiner deux traits raciaux pour en décupler les effets. Tout cela s'avère indispensable pour espérer finir le jeu sans devoir s'infliger un levelling affreusement rébarbatif avant chaque mission du scénario. Les dernières heures sont d'ailleurs pratiquement impossibles à boucler rien qu’à la force des poings. Le boss final, en particulier, relève tout autant du challenge tactique que d'une épreuve de force.

Les affrontements directs reposent sur le tour par tour classique, mais assorti du système d' « Extra Turn », qui est une version allégée du « Press Turn » de Lucifer's Call.
Concrètement, utiliser une attaque à laquelle l'ennemi est faible ou subir une attaque à laquelle notre personnage est résistant permet de gagner ou d'annuler un « Extra Turn ». L'initiative du combat et l'Agilité de chacun influent la probabilité de glaner ces tours supplémentaires, parfois assurés dès l'entrée des hostilités. L' « Extra Turn » se traduit, évidemment, par une seconde attaque à la fin du tour pour tous ceux qui en bénéficient, amis ou ennemis. Pour utiliser efficacement ce système, il faut parfois disposer d'un éventail de skills variés, et parfois pouvoir exploiter lourdement la faiblesse des plus redoutables adversaires, ce qui implique de s'adapter régulièrement.
Vous pouvez aussi « voler » certaines compétences des ennemis, démons ou humains, avec le « Skill Crack » pour les attribuer à vos unités humaines. Avant le début des combats, vous donnez à chaque équipe un skill à recopier d'un adversaire en particulier. Cependant, vous n'en deviendrez maître que si c'est bien la bonne équipe qui terrasse la bonne cible. De plus, toutes les aptitudes ne peuvent pas être recopiées. Un principe parfois très pénible, car le déroulement d'une joute tactique ne correspond pas toujours à ce que l'on a anticipé, surtout quand les conditions évoluent au fur et à mesure que les opposants sentent le vent tourner. Il est possible d'atténuer ces soucis en augmentant le « Fate » de façon à voir le héros et ses alliés cibler la même compétence, ce qui offre davantage de marge de manœuvre.

L'IA des ennemis est assez bancale. Sur le terrain, ils sont capables de choisir leur cible en fonction des pouvoirs qu'elle possède, de soigner leurs confrères à la première occasion, voire de garder leurs distances s'ils sont affaiblis. Or, en combat, on jurerait qu’ils lancent leurs attaques complètement au hasard, sans se soucier de nos HP, forces et faiblesses. Bien sûr, leurs erreurs de jugement sont souvent salvatrices, mais on en vient souvent à se demander comment leurs attitudes ont pu être codées de façon aussi incomplète et aléatoire, à un niveau qui n’est pas sans rappeler le Combat Auto des Suikoden.
Les combats se résument pour la plupart à éliminer tous les démons, mais certaines rixes vous imposeront des conditions sine qua none, parfois abusives. La palme revient, une fois encore, à ces fameuses missions où la défaite tombe dès lors que meurt l'allié provisoire, géré de surcroît par une IA suicidaire au possible. Un challenge déjà expérimenté dans Covenant of the Plume, remis au goût du jour, plus amer que jamais. Les maigres ajouts qui permettraient d'apaiser nos souffrances, comme faire monter au front des équipes fraîches en cas de besoin, ne sont toujours pas au programme. On peut changer de démons aussi souvent que nécessaire, mais on a beau avoir six humains en réserve, il est impossible d’en faire venir un seul en renfort quand la bataille tourne au désastre, un constat toujours aussi désolant.

Tout ceci n'est en résumé que le gameplay de Devil Survivor premier du nom. Sa suite, au départ, n'y apporte pas d'innovations majeures. On ne peut citer que l'apparition de quelques nouvelles races comme les Ghosts ou les Omegas, et donc de nouveaux traits raciaux. En revanche, à l'approche du niveau 40 ou 50, on rencontrera des traits raciaux « évolués » pour chaque catégorie de démon, ce qui altère pas mal le gameplay. Rappelons également le « Fate » qui donne des aptitudes spécifiques, ajoutons-y une poignée de pouvoirs inédits, et on aura fait le tour des nouveautés du système.

- Adjugé, vendu ! Vous êtes bon pour être fusionné ! -

Avant chaque mission, il y a plusieurs tâches à effectuer pour constituer ses équipes de démons. En effet, vos alliés surnaturels ne sont pas obtenus au cours des batailles comme dans un SMT classique. Il y a trois façons de se les procurer : les ventes aux enchères, les fusions et le Compendium, l'un des ajouts majeurs de Devil Survivor 2.

Le système d'enchères a été largement modifié par rapport au précédent volet, dans lequel il suffisait de miser quelques Maccas de moins que le prix d'achat direct pour être sûr de l'emporter. Désormais plus proche d'un mini-jeu de poker, vous avez cinq secondes pour lancer une seule enchère, face à deux ou trois concurrents. Leur intention (laisser couler, se rétracter ou relancer de toutes leurs forces) se dévoile à mesure que le temps défile. Le plus souvent, miser directement un peu plus que leur enchère prévue, lisible avant le lancement du chrono, permet d'obtenir le démon convoité. On peut aussi miser moins, car leur mise finale peut être inférieure à leur annonce. Ces extrapolations tombent parfois à plat, mais cela fait partie du jeu.
Des enchères « spéciales » peuvent se déclencher au hasard après chaque coup de marteau. Les entités sont alors proposées à des prix sacrifiés, ou au contraire plus chères mais dotées de compétences exceptionnelles. Les enchères reposent sur un système identique à celui du premier opus, chacun pouvant annoncer son prix aussi souvent qu'il le souhaite pendant cinq secondes, la plus haute mise l’emportant. Relancer assez fort et vite mène souvent les concurrents à se coucher et permet de se voir adjuger la créature souhaitée sans débourser une trop grosse somme.

Mais tous les démons ne sont pas disponibles aux enchères, loin s'en faut. De plus, à force de l'employer, votre créature deviendra de moins en moins efficiente, et chaque niveau supplémentaire coûtera de plus en plus d'expérience. Dès lors, il faudra fusionner deux démons pour en créer un plus puissant, tout en lui léguant n'importe lesquelles des compétences des sacrifiés, dans la limite de trois commandes actives et trois passives. Le jeu introduit ici les « Add-Ons », proches des cristaux de Strange Journey. Obtenus au cours des combats les plus rondement menés, ces artefacts permettent de donner divers bonus à un démon fusionné, comme un choix de skills encore plus vaste ou une augmentation des caractéristiques ; cela donne un petit coup de pouce parfois appréciable, mais jamais crucial.
Dans Devil Survivor, les fusions ne se lancent pas forcément au petit bonheur ; on peut connaître, si on le souhaite, toutes les combinaisons de fusions possibles pour obtenir le démon de notre choix. De plus, ce n'est pas le hasard qui décide ici de la répartition des pouvoirs transmis, mais bien le choix du joueur. Ces possibilités peuvent passer pour une odieuse atteinte à la difficulté légendaire de la saga ; nonobstant, cela s'avère souvent très commode et évite pas mal de tâtonnements.

Le Compendium, l'encyclopédie mythologique des MegaTen inaugurée avec le troisième opus (intitulé Lucifer's Call chez nous), était l'une des plus grosses lacunes du premier Devil Survivor. Cet oubli se voit ici réparé, et ses deux utilités sont encore au rendez-vous. La première est de pouvoir racheter n'importe quel démon que l'on a déjà possédé contre une certaine somme d'argent, sans passer par la fusion ni l'enchère. Attention, si cela représente un énorme gain de temps, surtout quand un démon nécessaire à une nouvelle création par fusion n'est pas disponible ou pour la famille des Elements, il faut savoir que les articles de ce catalogue coûtent la peau des fesses. L'achat direct s'avère trois à six fois plus onéreux que les enchères. Mieux vaut n'y recourir qu'en cas de réelle nécessité, sans quoi les Maccas durement gagnés fondent comme neige au soleil.
La seconde fonction du Compendium est de pouvoir lire un descriptif culturel de chaque démon : la mythologie dont il est issu et un rapide aperçu de son histoire ou de son rôle. La plupart des figures de ce jeu étant déjà rencontrées dans Strange Journey, ainsi que dans d'autres jeux de la licence comme Lucifer's Call ou Persona 3, on pourrait craindre que le Compendium de DeSu 2 ne nous apprenne pas grand-chose de neuf. Heureusement, ce n'est pas le cas : pas mal de démons « anciens » sont servis d'informations inédites, ce qui mérite qu'on lise les informations avec attention. Le jeu présente aussi un nombre non négligeable de nouvelles figures. Les néophytes, quant à eux, pourront se jeter à corps perdu dans cette lecture variée, pour peu qu'ils soient intéressés.

- Arrêtez de rêver de vivre, commencez à vivre vos rêves ! -

Les SMT sont réputés pour leurs fins alternatives ainsi que leur challenge ardu promettant de longues heures de jeu. Or, dans ce domaine, les six épilogues différents de Devil Survivor compensaient vaille que vaille sa durée de vie un peu faible et son challenge en montagnes russes, en particulier sur le dernier jour, des caractéristiques encore plombées par le New Game + fort avantageux du soft.

Sa suite rééquilibre de son mieux ce constat, même si la durée de vie reste de l'ordre de trente ou quarante heures pour quatre fins différentes, dont une secrète. Toutefois, des défis assez corsés vous attendent tout au long de l'intrigue, pas uniquement sur le dernier jour, surtout que chaque épilogue ne promet pas le même challenge. Attaquer directement par la fin « secrète » du jeu, la plus intéressante, peut témoigner d'un grand masochisme. La difficulté peut être plus élevée si vous ne pouvez pas, ou ne souhaitez pas sauver tous vos alliés du trépas qui leur est promis par Nicaea. Cela contraindra parfois à s'entraîner longuement ou à composer une équipe de démons savamment pensée pour triompher des conditions imposées.

Si le gameplay du jeu semble bien moins complexe que ceux de la plupart des Tacticals, il recèle quand même une indéniable richesse dans ses possibilités. Du moment qu'on prend la peine de renouveler régulièrement ses effectifs, de ne pas configurer les aptitudes à tort et à travers mais aussi d'expérimenter toutes sortes de combinaisons de traits raciaux (comme Chaos Wave et Free Leap, par exemple), le challenge reste envers et malgré tout abordable, surtout qu'il est possible d'enchaîner autant de Free Battles qu'on le souhaite. Celles-ci servent souvent à mesurer votre puissance : tant que vous ne les finissez pas sans trop de problèmes, c'est que vous n'avez pas le niveau pour poursuivre l'histoire. Du reste, si vous n'avez pas mis les heures précédentes à contribution pour bien cerner toutes les possibilités du gameplay, le dernier jour se montrera encore une fois d'un niveau absolument incomparable avec le reste de l'aventure. Mais dans l'ensemble, il faut admettre que ce Devil Survivor 2 s'avère globalement plus exigeant que son aîné, sans être aussi abusif que d'autres SMT, et ce ne sera pas pour déplaire aux fans, ni aux nouveaux joueurs.

Pour augmenter sa « replay value », le jeu propose une fois encore de très nombreux dialogues avec les personnages secondaires. Chacun de ces échanges, ainsi que les événements obligatoires, coûtent une demi-heure (fictive, bien entendu) et une journée dure généralement de 8h à 22h. Bien entendu, il y a beaucoup plus de dialogues que vous n'avez le temps d'en lire, et de toute façon, ces parlottes et leurs QCM associées n'ont pratiquement aucune influence sur l'histoire. Elles font parfois progresser le « Fate » de vos alliés, mais elles n'altèrent pas l'épilogue, ni les événements du scénario. Ce type de déroulement, très textuel, n'avait pas su conquérir tous les joueurs en 2009, et ce constat a des chances de se répéter en 2012, d'autant plus que le jeu n'est toujours pas disponible en français. En outre, contrairement au premier Devil Survivor où les événements clés se dispersaient sur toute la semaine que comportait l'histoire, et permettaient parfois d'accéder à des informations ou scènes différentes en fonction de vos décisions, vous n'aurez qu'un seul choix à faire au soir du sixième jour dans Devil Survivor 2 pour aiguiller uniquement le dénouement. Les trois fichiers de sauvegarde proposés par ce nouvel opus auraient été plus utiles dans le premier.

Le New Game + de ce titre ressemble à celui des Tales of : à part deux ou trois effets automatiques, les bonus doivent être « achetés » à l'aide de points gagnés au cours des batailles, en fonction de votre efficacité. Cela permet de boucler le jeu plus rapidement, de façon à ce que les joueurs les plus acharnés puissent enchaîner les quatre fins sans devoir y passer cent soixante heures.

Bilan mitigé pour ce Devil Survivor 2. Ce titre cherche à se démarquer au moins un peu de son grand frère, un effort agréable à l'heure du recyclage intensif qu'affichent pas mal de jeux vidéo, mais il ne parvient pas à faire souffler le même vent de nouveautés que le premier opus avait amené. Malgré cela, Devil Survivor 2 reste un RPG vraiment intéressant, doté de réels atouts. Son scénario, même s'il semble basique et pas très acerbe, présente des questionnements moralistes assez justes et présents pour mériter le détour, servis à merveille par des protagonistes variés. De surcroît, son gameplay reste toujours aussi simple d'accès que riche de possibilités, les quelques ajouts par-ci par-là sont assez agréables, bien qu'ils s'attachent plus aux détails qu'à l'essentiel, la bande-son a fait d'énormes progrès et la difficulté du jeu, plus exigeante mais aussi mieux équilibrée, ne pourra que satisfaire les fans assidus. Un jeu tout ce qu'il y a de sympathique, qui plaira certainement aux fans du précédent opus ainsi qu'aux grands amateurs de mangas, mais certainement pas un incontournable ni une expérience qu'on recommanderait à tous les joueurs de RPG.

Note attribuée : 16/20

Rédigé par Wolf le 18/06/2012

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