Crimson Gem Saga | |||||
En 2006, le studio coréen Sonnori nous offrait un portage PSP d’Astonishia Story, sorti initialement sur GP32. Un jeu qui n’avait pas réellement convaincu les critiques et qui s’avérait assez difficile voire parfois rebutant. Une histoire de cailloux Crimson Gem Saga vous place dans la peau de Killian von Rohcoff, un tout jeune Chevalier diplômé de l’académie de Green Hill. Notre histoire débute lors de la remise des diplômes de ce dernier, au cours de laquelle il apprend qu’il n’est que le deuxième de sa promotion. Désillusion pour lui : il ne pourra intégrer la meilleure des meilleures milices. Sur recommandation du Directeur de l’Académie, il est envoyé à l’Ouest pour chercher un travail dans une milice locale et rencontre sur le chemin, Spinel, une voleuse qu’il sort d’un assez gros pétrin. Après cet évènement, elle l’accompagne et il s’enrôle dans la milice conseillée, qui s’apprête à partir en mission. Au cours de cette dernière, la milice se fait décimer par un personnage terriblement mystérieux qui semble désireux de se procurer des pierres magiques qui détiennent un pouvoir capable de détruire le monde ! Il décide donc d’enquêter sur ce personnage et de sauver le monde. Rien que ça. Vous l’aurez compris Crimson Gem Saga nous offre un scénario classique de RPG. Qui dit scénario classique, dit personnages stéréotypés ! Vous aurez donc la joie de parcourir le monde avec un héros jamais content, une voleuse espiègle, un magicien arrogant, un vieil homme qui aime boire, un moine et une femme de la quarantaine pleine de remords. Les personnages s’avèrent plat, leur passé n’étant que trop peu relaté et à la fin de l’aventure, on se rend compte qu’ils n’ont pas du tout appris de leur voyage. Le joueur non plus, d’ailleurs. Néanmoins il faut noter la présence de quelques notes et scènes d’humour qui agrémentent les dialogues et réussissent à remonter par à-coups l’intérêt des dialogues. Malgré cela, la traduction anglaise – hasardeuse – laisse à désirer (quelques « woot » et autres non-sens) ce qui nous donne une véritable impression de bouillie scénaristique.
Une direction artistique plaisante Voici ce qui pourrait être le seul et véritable point fort du jeu : la direction artistique. En effet, le titre est charmant, coloré et détaillé. Les sprites 2D sont fins et expressifs. Ils retranscrivent fidèlement les très beaux artworks qui agrémentent (peut-être un peu trop, tellement ils prennent de place à l’écran) les dialogues les plus importants. En revanche on ne dénombre qu’un seul artwork par personnage, c’est un peu léger tout de même. Les sprites sont particulièrement bien animés lors des combats, où les mouvements sont fluides et détaillés.
Cependant ce point positif n'est valable que pour les personnages principaux, les décors en villes et les ennemis les plus importants. Le reste manque beaucoup plus de vie et n’en est que plus insipide. Les PNJ sont indubitablement recyclés de manière très insistante (il est possible d’avoir plusieurs fois le même personnage dans le même écran !), les décors en combat sont relativement vides, et les donjons proposent plusieurs fois les mêmes décors, qui manquent cruellement d’originalité et surtout de vie. Nous aurons d’ailleurs l’opportunité d’en reparler un peu plus tard, de ces fameux donjons. Enfin, on pourra déplorer le manque de discernement des ennemis, qui sont clairement apparents sur la carte, à la manière d’un Grandia. En effet, ces derniers on tous la même apparence, à savoir un gobelin bleu, que ce soit dans les artworks des combats ou dans les donjons. Ceci pose un énorme problème car certains peuvent cacher aléatoirement un seul ennemi ou plusieurs, mais surtout ces ennemis peuvent être d’un tout autre niveau que votre équipe ! Il faut donc croire que le designer était tellement en retard dans son planning qu’il a décidé de nous rendre la vie dure.
Relativisons toutefois : si ce jeu nous malmène, ce n’est pas simplement à cause du problème de discernement des ennemis. Oh que non !
Une lenteur désobligeante Crimson Gem Saga aurait pu être un excellent jeu car il présente des traits qui ont fait le succès des RPG de notre jeunesse ; pour autant, le jeu s’avère à terme à la fois ennuyeux et frustrant à cause de certaines mécaniques qui le ruinent complètement. Attendez-vous cependant à retrouver le combo classique de personnages qui peuvent utiliser des attaques normales, des sorts, des objets et fuir.
Avant toute chose, les déplacements sur la carte s’avèrent une plaie sans nom tellement votre personnage est un véritable tank digne des plus gros panzers de l’armée allemande ! Les déplacements en diagonale sont impossibles (quelle galère !) et vous ne pouvez pas courrir ; de ce fait vous êtes condamnés à errer avec un boulet au pied jusqu’au Chapitre 2 (environ 7 heures de jeu minimum) où vous pourrez acheter des bottes à un marchand perdu qui, miracle, vous coûteront la peau des fesses mais vous permettront de marcher plus vite une fois équipées. Joie !
Pendant ces sept premières heures vous ne pourrez donc pas éviter les combats avec les ennemis. En effet, à la manière de Persona 3, vous avez plusieurs manières d’engager un combat. Soit vous arrivez à vous faufiler et surprenez l’ennemi pour obtenir une attaque préemptive, soit il vous remarque mais vous arrivez à le toucher avant que le « ! » au dessus de sa tête disparaisse, soit il vous poursuit et finit immanquablement par vous rattraper (et vous botter les fesses avec une attaque préemptive) car il court diablement plus vite que vous. Par contre vous pouvez lui échapper si vous parvenez à toucher un des coins qui vous fait changer d’écran.
Une fois que vous aurez touché l’ennemi vous rentrerez, après avoir subi un long temps de chargement, en phase de combat. Cette dernière se déroulera indubitablement d'une seule et unique manière : votre personnage avec l’agilité la plus grande agira en premier, viendront ensuite les ennemis les plus rapides, puis vos personnages restants. Le problème est que cette statistique n’évolue et n’évoluera jamais, ce qui rend les combats totalement répétitifs et insipides. Il suffit alors de surentraîner votre personnage le plus rapide pour qu’il annihile les ennemis le plus rapidement possible, avant d’aller enchaîner un autre combat.
Le jeu a néanmoins introduit un principe original : lorsque vous réalisez une attaque normale, après un temps de chargement pour la lancer, apparaît de temps à autres un « X » sur lequel il faut appuyer une ou plusieurs fois, vous permettant alors de réaliser une attaque critique dévastatrice et non sans classe. C’est bien la seule chose qui vous tient réveillé devant votre PSP, d’ailleurs. Malheureusement, cette probabilité d’attaque critique est directement tirée de la chance des personnages, il suffit donc de sur-booster cette caractéristique pour pouvoir en faire une à chaque attaque. Craqué.
Des idées obsolètes Les sorts que vous pouvez lancer sont soit extrêmement puissants, coûtant énormément de MP, soit extrêmement ridicules… et coûtant encore plus de MP qu’ils ne sont utiles. Chaque personnage possède donc une pléthore de sorts, dont un qui est évidemment le plus gourmand en MP, mais qui est assurément et de très loin le plus fort. Tellement fort que vous n’utiliserez jamais les autres techniques une fois que vous l'aurez acquis. C’est d’ailleurs la mécanique des combats que je viens de résumer.
Comme dans tout bon RPG, certaines armes proposent des attributs élémentaires : foudre, feu, glace et consorts sont au programme. Malheureusement c’est une méthode mal implantée (encore une fois). En effet, il n’existe pas à proprement parler de « donjon de glace », par exemple, ni même de manière notable de discerner les faiblesses élémentaires des ennemis, à part en testant. Ceci s’applique malheureusement aux boss, si bien que vous pouvez
Les armes peuvent être personnalisées à l’aide de gemmes que vous pourrez trouver en tuant des ennemis. Elles rajoutent un attribut élémentaire ou améliorent certaines caractéristiques. Les utiliser pour ajouter un élément est donc un pari risqué, devant le manque de discernement des faiblesses des ennemis.
Ensuite les magasins que vous rencontrerez sur votre route vous rappelleront ceux de FFXII en pire, à cause des prix de leurs marchandises avec des chiffres à plus de quatre 0 voire encore plus ! Sachant que vous êtes payés au lance-pierre, vous offrir un simple casque vous coûtera des heures et des heures de farm. Merci Sonori.
Pour finir avec les mauvaises idées, le soft nous propose, contrairement à tout bon ancien RPG qui se respecte, de faire évoluer nos personnages à un rythme différent. Le joueur doit donc choisir une équipe type au début du jeu et la garder sous peine de devoir refaire des heures et des heures de combats quand il décide d’en changer. Le problème étant lorsque, comme précédemment dit, un de vos personnages vous quitte en plein milieu de l’aventure, vous laissant avec un personnage qui peut être à la moitié des niveaux de votre équipe. Super, d’autant plus que lorsque celui-ci reviendra, il sera au même niveau que lorsqu’il a quitté l’équipe, forçant donc le joueur à aller refaire de longues heures de séances d’entraînement ou à le ranger dans un tiroir. Encore une fois, un mauvais choix de développement, un peu à la manière de Brave Story, qui faisait même pire en donnant un personnage niveau 1 alors que les autres sont niveau 50.
Quand on se lasse d’explorer Crimson Gem Saga souffre d’un énorme problème de rythme et de quelques incohérences qui rendent l’expérience de jeu pénible. Entre deux éléments de l’histoire et des visites dans les villes, ce sont des heures de bash et de tours en rond au sein de donjons, pour le moins vastes, confus et insipides, qui vous attendent. Ils sont composés de nombreuses pièces qui se ressemblent, de nombreux étages, de nombreuses voies sans issue, de nombreux trésors facilement manquables. Face au nombre de subdivisions de chemins à l’intérieur des chemins (un peu comme dans Inception en somme…), arriver sur un trésor relève de la chance pure, si bien qu’au bout d’un moment, on avance à l’aveugle en espérant tomber sur quelque chose d’intéressant.
Mal concevoir un donjon est pardonnable, mais si l’erreur se répète sur tous, c’est inexcusable. Certes d’antan les donjons étaient vastes, et quelques fois labyrinthiques, un peu comme dans Crimson Gem Saga, en revanche ils ne demandaient pas d’idiotes conditions pour être parcourus. Je m’explique.
Un des donjons requiert de suivre des torches sous peine de se retrouver téléporté à son entrée. Jusque là, pas de vraie originalité, sauf quand les développeurs décident à partir d’un moment de les retirer ! Vous voici donc à devoir choisir aveuglement votre direction parmi l’une des quatre branches, à savoir nord-ouest, nord-est, sud-est et sud-ouest, ce qui rend l’orientation assez difficile, et à faire sans cesse des allers-retours dans ce labyrinthe, vous faisant perdre un temps monstrueux. Une fois arrivé au bout, vous vous rendez compte qu’il fallait activer un évènement sur la carte du monde avant de rentrer dans le donjon ! Quelle joie de ressortir, d’aller activer cet évènement indiqué très vaguement par « aller vers l’endroit untel », et de parcourir à nouveau le donjon ! Vous avez perdu pour la énième fois une pléthore d’heures. Malheureusement, cet exemple n’est pas un cas isolé.
Il faut cependant voir le bon côté des choses : on peut sauvegarder à n’importe quel endroit, comme dans YS Seven. En revanche aucun endroit n’indique globalement quand un boss va arriver, du coup un game over peut vite survenir, si bien qu’il vous faudra refaire votre donjon, votre xp…bref, repasser de nombreuses heures bien mornes dans ce donjon. Malheureusement (quoi, encore ?), ne sauvegardez jamais au milieu d’un donjon, sauf si vous êtes sûr de rejouer au jeu le lendemain. Face à ces labyrinthes, reprendre une partie après une trop longue absence vous rendrait fou, car aucun guide ne pourra décemment vous aider, du fait de la similitude de 80% des éléments du décor de ce donjon.
Une ambiance musicale ratée Autre point qui vient ternir une copie déjà bien sale : la musique. Nous revoilà au temps des musiques 16-bits, ou presque. Park Sang Hyuk nous livre ici des thèmes pour le moins nauséeux et répétitifs, que l’on finit par couper une fois entendu la première fois, d’autant plus que le système audio de la PSP n’arrange rien.
Qu’en est-il des bruitages alors ? Ceux-ci sont minimalistes, comme au temps de la SNES, et accompagnent très mal les animations en combat, manquant de pêche à l’impact, nous donnant une impression de légèreté des coups.
Cependant, une très bonne initiative amène un peu d’éclaircie dans ces nuages bien grisonnants : les doublages ! Et oui, fait assez rare, surtout sur PSP. Les doubleurs arrivent ici à insuffler la vie à leurs personnages, qui se révèlent plus sincères, et parviennent à montrer leurs vraies émotions. Leurs intonations sont justes et rendent les scènes comiques bien plus drôles.
Un long calvaire Comptez à peu près entre 25 et 30 heures pour finir le jeu, en allant en ligne droite pure. Cependant les allers et retours vous feront perdre de nombreuses heures, alors il faudra compter en réalité sur plus de 40 heures pour terminer une partie. Un véritable calvaire. Le donjon optionnel vous fera souffrir encore plus longtemps, alors évitez-le.
Bref, vous l'aurez compris, le jeu ne se prête pas a être rejoué, à moins d'être masochiste. À noter que la version iPhone du jeu vous débloque un nouveau donjon, le moulin, qui ne possède aucun intérêt.
Note attribuée : 9/20
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