Half Minute Hero | |||||
Ce n'est un secret pour aucun joueur, le RPG (et plus particulièrement le J-RPG) est un genre de jeu de longue haleine dans lequel un héros se voit propulsé au cœur d'une aventure épique aux proportions qui le dépassent. Luttant contre les éléments, la destinée et quelquefois même des Dieux, on suit sa quête sur parfois plusieurs centaines d'heures... Mais si la menace était plus proche qu'on ne le pensait ? Si le monde était amené à être détruit dans les 30 prochaines secondes ? C'est sur cette idée complètement surréaliste et géniale que se base Half Minute Hero, véritable hommage au RPG d'antan qui ne manquera pas de laisser sa marque sur ceux qui s'y seront essayé. On vous avait dit qu'c'était beau ... Non ? Au vu de la structure particulière du jeu et donc de celle du test, il semble judicieux de parler de l'aspect artistique maintenant, car il s'agit d'un des points les plus singuliers du soft et cela n'aura probablement échappé à personne : Half Minute Hero joue la divergence jusque dans son style graphique, affichant sans rougir un pixel art en 2D résolument old school, tellement que l'on peine parfois à comprendre ce qu'un sprite représente ! Cette direction artistique décalée montre jusqu’où les développeurs ont voulu pousser la dérision. C'est l'histoire d'un RPG...? Bien qu’ayant affirmé que Half Minute Hero était un RPG, il convient de nuancer ces propos : en effet le jeu se divise en un ensemble de modes de jeu (4 différents et un 5ème secret) dont seul le premier se rapproche vraiment d'un RPG stricto-sensu. Chacun de ces modes est radicalement différent du précédent et s'inspire d'un genre bien précis renouvelant ainsi sans cesse le gameplay. Coupant comme une lame, rapide comme l'éclair Le premier mode de jeu, qui sert en quelque sorte d'introduction au scénario et aux mécaniques de gameplay, est le mode Hero 30. Ce dernier qui est donc le plus proche d'un RPG raconte comment les méchants sont entrés en possession d'un sort permettant de détruire le monde après 30 secondes d'incantation et comment, après moult supplications de la part de l'humanité, la déesse vous envoie sauver la planète, l’amour et la vérité. Vous voici donc au début de votre aventure, Vous, valeureux héros aux jambes lestes. Au niveau 1 et vêtu d'un simple caleçon, il vous faudra courir vite et dans tous les sens pour engranger or et expérience afin de vaincre le « Evil lord » du niveau et ainsi mettre fin à sa litanie destructrice évitant l’annihilation pure et simple de toute vie en 30 secondes... Ou un peu plus, car si la déesse vous envoie (vite) battre la campagne sans arme et pratiquement en tenue d'Adam (tout du moins au début) elle vous gracie tout de même de petits jokers pour vous aider un peu : une prise d'expérience extrêmement rapide et la possibilité de remettre le compteur à zéro en priant à l'une de ses statues dans un village de la carte (seul endroit ou le chrono s'arrête) moyennant monnaie sonnante et trébuchante. Dans ce mode de jeu, bien que chaque mission soit différente, elles possèdent toutes une structure similaire. Ainsi on retrouvera les villages où le temps est figé, où on peut se soigner, acheter de l'équipement et remonter le temps contre de l'or (pour peu que le village possède une statue) et la carte du monde sur laquelle sont parsemés villages, grottes et autres donjons et où on peut se déplacer librement tandis que le chrono défile. Comme dans tout bon RPG, il est possible de rencontrer aléatoirement des monstres sur cette carte et de les affronter pour espérer les vaincre et gagner argent et XP. Le temps ne s’arrêtant pas pendant un combat, une des difficultés réside dans le fait de bien planifier vos sorties sur la carte, chaque affrontement pouvant donner lieu à des luttes frénétiques dans l'espoir de sauver la moindre seconde afin de pouvoir retourner sereinement en ville remonter le temps. Absolument grisant. Un autre point essentiel est la gestion de l'or. Chaque prière coûtant plus cher que la précédente et l'or servant aussi à se soigner et à acheter de l'équipement, il convient de bien gérer son temps pour optimiser ses dépenses afin de pouvoir acheter cette épée du brave qui nous fait de l’œil depuis un moment, car si notre héros recommence au niveau 1 au début de chaque mission, il conserve son équipement. Il est à noter qu'il est possible, une fois une mission terminée, de la refaire à tout moment en conservant quelques équipements et/ou objets, permettant ainsi d'améliorer son score ou encore de finir la mission d'une manière différente pour tenter de débloquer des missions annexes secrètes. Ainsi les missions s’enchaînent à un rythme haletant et on suit avec plaisir l'évolution d'un scénario jouant habilement avec les clichés du RPG. Car si Half Minute Hero est un hommage aux RPG, il est un hommage intelligent, opposant au classicisme assumé de son histoire des personnages hauts en couleurs, des dialogues truculents et très souvent hilarants (la déesse et le evil lord étant absolument fantastiques à ce niveau-là) et des situations cocasses (une amourette... particulière, par exemple). D'apparence un simple pastiche minimaliste du RPG, le mode Hero 30 se révèle absolument génial, grisant et bien pensé. Princesse Starla et l'arbalète magique S'apparentant à un shoot'em up à scrolling horizontal à vitesse variable, le second mode de jeu, nommé Princess 30 vous met aux commandes de la princesse et de son escorte dont la mission est de ramener divers objets au château. Mais attention, le paternel de la demoiselle étant très strict, cette dernière dispose d'une permission de sortie de 30 secondes avant son couvre-feu. C'est peu mais il faudra faire avec. Heureusement, notre intrépide princesse ne sera pas sans aide. Portée par une foule de gardes servant d'escorte et armée d'une arbalète magique changeant radicalement sa personnalité en celle d'une furie survoltée, voilà qu'elle quitte le château en quête de précieux artefacts à ramener fissa. Si ce mode est principalement un Shoot’em up sous stéroïdes, il reste relativement « technique » et se démarque tout de même des autres par quelques options. Outre les power up (plus ou moins) habituels : tir dans toutes les directions, plusieurs flèches d'un coup ect. Il sera nécessaire de réaliser des « combos » sans se faire toucher pour augmenter la vitesse de déplacement et la cadence de tir. On retrouve aussi la nécessité de bien se placer pour ne pas risquer de rater les tapis rouges, sur lesquels il faut rester pour que la déesse remonte le temps. Si Princess 30 se montre moins riche en contenu que le mode précédent, il n'en demeure pas moins complètement déluré à l'image de son postulat de départ. Par exemple l'escorte précédemment citée sert grosso modo de barre de vie à notre tête couronnée, chaque coup entraînant le décès de quelques un des soldats qui la composent. Là où cela devient très drôle, c'est que chaque membre de cette troupe possède sa propre identité, et des amis qui réagiront en criant son nom au moment de son trépas. Autant dire que les grands moments d'hécatombe donnent lieu à des instants très marrants, où Bobby et Johnny pleureront la tragique destinée de Jimmy (noms véridiques). Moins dense que le mode Hero 30 mais tout aussi survolté, Princess 30 n'en demeure pas moins très agréable, rafraîchissant et complètement loufoque. Amour gloire et surtout beauté Le troisième mode de jeu, nommé Evil Lord 30, vous met aux commandes d’un des antagonistes de Hero 30 : Le « Bel Evil Lord » (c’est son nom, enfin jusqu’à ce que vous lui en donniez un) qui, après avoir été défait dans le premier mode de jeu, part en quête d’un remède pour lever la malédiction dont souffre sa bien-aimée Milenna, transformée en chauve-souris et qui en profitera pour, au passage, annihiler toute trace du « Mal » sur son chemin. Tout cela en beauté bien entendu. Qui dit nouveau mode de jeu dit nouveau gameplay qui se rapproche ici beaucoup d’un RTS (Real Time Strategy ou Stratégie en Temps Réel) mais une fois n’est pas coutume, à la sauce Half Minute Hero. En effet notre beau héros est capable d’invoquer 3 types de monstres différents : brute, nimble et shooter (soit grosso modo : brutes, agile et tireur). Chacun est plus ou moins efficace face aux ennemis eux aussi séparés dans ces 3 catégories, recréant ainsi un sorte de pierre-papier-ciseaux. Ainsi, les brute battent les nimble, les nimble battent les shooter et les shooter battent les brute. Si Half Minute Hero est un jeu baignant dans l’humour et la dérision, le mode Evil Lord 30 est probablement celui qui a le plus embrassé cette direction. Chaque dialogue, chaque intervention est à mourir de rire et bien que l’histoire commence sur une note relativement plus sérieuse que celle des autres modes (enfin, dans le fond uniquement) l’esprit du jeu reprend vite ses droits et on assiste alors à des dialogues de sourds hilarants et des quiproquos absolument fendards le tout baignant dans des références pop culture tombant justes. Au final plus ardu qu’il n’y paraît au premier abord (surtout pour le complétionniste visant le rang « beautiful evil lord » à chaque mission), Evil Lord 30 se montre aussi plus technique et surtout très complet. Fantastique détournement du genre RTS, ce mode est à l’image des précédents, une réussite. Une « beautiful » réussite. Ma vie pour un sort de destruction massive Le dernier mode de jeu (enfin, mode dans le sens au gameplay différent, mais nous y reviendrons) nommé Knight 30 vous met au contrôle du Knight, un fier chevalier tombé au combat et ramené à la vie par le Sage, une figure mystérieuse qu’il vous faudra maintenant protéger au péril de votre vie des différents dangers qui le menacent (parce que mine de rien vous lui en devez une). Si à ce moment on peut se demander « mais du coup, pourquoi le sage a-t-il besoin de nous ? » la réponse est simple : Ce sort met 30 secondes à être lancé (fort heureusement pas consécutives) et pendant ces 30 secondes, il vous faudra donner de votre personne pour empêcher qu’il ne soit interrompu. Pour varier les plaisirs au cours des trentes niveaux qui composent ce mode, il vous arrivera de devoir détruire des cloches démoniaques empêchant le Sage de se concentrer, ou d’affronter des boss redoutables (« Maximum Grillade » est un ennemi à ne pas prendre à la légère) qui changeront votre manière de jouer. Entre chaque mission, il vous sera aussi possible de dépenser quelques précieux points d’endurance (nécessaires pour rester accroché aux ennemis mais aussi sprinter) pour confectionner pièges et autres défenses que vous pourrez par la suite disposer dans le niveau dans le but de parfaire vos tactiques. Bien que l’ambiance de départ du mode semble plus… sérieuse que celle qui règne dans le jeu en général (c’est l’Apocalypse, les monstres sont partout, la déesse du temps n’est plus) ici aussi la dérision reprend vite ses droits (après tout, un des boss s’appelle « Maximum Grillade »...) et le contraste entre la bêtise du Knight et la sagacité du Sage donne lieu à de délicieux moments de pure folie. Si le mode Knight 30 ne s’apparente pas vraiment à un genre de jeu connu (peut-être un tower defense revisité sauce J-RPG) il demeure fondamentalement un fantastique divertissement, relativement facile certes, mais efficace, drôle et extrêmement addictif. Père castor, raconte nous une histoire Si, dans Half Minute Hero, tous les modes de jeu sont radicalement différents, ils n’en suivent pas moins un fil conducteur en terme de scénario (comme l’indique la présence récurrente de la Déesse du temps.) Ce dernier segment de l’histoire transcende ce qui à été fait précédemment pour offrir une conclusion absolument mémorable, dont la portée n’a rien à envier à des jeux plus sérieux. Un petit interlude musical Avant de conclure, il semble important de parler de l’aspect musical du titre. La bande-son, qui a nécessité la collaboration d’une dizaine d’artistes de renom (dont Mr Motoi « Star Ocean » Sakuraba qu’on ne présente plus ou Mister Norihiko Hibino connu pour son travail sur Zone of the Enders et Metal Gear Solid) participe énormément à l’ambiance du jeu. Savant melting-pot de tout ce qui se fait de bon, tantôt douce, tantôt survoltée, elle sait aussi se faire absolument épique (à l’image du thème principal du jeu, une pure merveille) rendant la lutte de nos héros pixélisés aussi exaltante que comique. Toutes les pistes ne se valent pas, mais l’OST réserve quelques pépites savamment placées au sein du jeu qui ressortent d’autant plus. Un succès.
Note attribuée : 17/20
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